Formations en constellations : avancées et craintes des professeurs des écoles

Dans toutes les circonscriptions se mettent en place des formations par constellation en maths et en français. Ces nouveaux modes de formation basés sur de la recherche action, si elles sont très liées aux pratiques des enseignants, peuvent poser question sur d'autres aspects.

Combien de fois n’a -t-on pas entendu à la sortie d’une animation pédagogique :
« c’était bien mais c’est complètement irréalisable dans ma classe, complètement déconnecté de ce qu’il est possible de faire avec mes élèves ! ».
C’est pour sortir de ce discours récurrent que dans tous les départements le dispositif de formations par constellations a été pensé : mieux répondre aux attentes fortes d’accompagnement pédagogique au plus proche de la réalité du travail en classe.

Un enjeu intéressant  pour ancrer la formation dans le travail réel des enseignants en classe

Une constellation correspond à 6 à 9 professeurs des écoles d’un même cycle (d’une école ou de plusieurs écoles proches, d’un RPI…) regroupés pour travailler collectivement sur une problématique commune en mathématique ou en français. Chaque constellation bénéficie de 30 heures de formation :

  • 18h hors temps de classe (correspondant à la totalité des heures d’animations pédagogiques)
  • 12h pendant le temps de classe (dédiés à la mise en œuvre de séances, l’observation entre pairs, les visites de Conseillers Pédagogiques de Circonscription) – dont 9h prévus en remplacements (programmés comme des stages avec les CPC), les trois autres heures le PE étant en classe, lui même observé.
    Nous sommes donc en l’an 1 (sur les 6 du plan), de cette formation exclusivement axée sur le français et les mathématiques.
    Concrètement, tous les PE seront donc formé·e·s sur ces deux disciplines d’ici à la fin de l’année scolaire 2025/2026.

Des conseillers pédagogiques au service des collègues

Il s’agit donc bien de mieux faire correspondre formation et pratiques pédagogiques des enseignants par des échanges entre pairs en petits groupes.

Outre le fait que ces formations doivent permettent aux conseillers pédagogiques de revenir sur le cœur de leur métier, c’est le principe Formations en constellationsmême de la recherche-action qui est au centre du dispositif.
Dès lors, les apports théoriques se croisent avec les mises en pratique au sein des classes par les enseignants de ces constellations. Elles offrent ainsi la possibilité de faire un travail pluriannuel permettant la co-observation voire la co-construction de séances. Penser collectivement la formation doit aussi pouvoir être gage d’une certaine autonomie de mise en œuvre en fonction de la réalité de la classe, de l’école et du public accueilli.

Des conditions nécessaires pour la réussite de ces formations

La formation est une des demandes majeures des enseignants du premier degré.
Cependant, pour que celle-ci soit efficace, il paraît nécessaire pour le Sgen-CFDT qu’un certain nombre de conditions soient réunies.
Il est avant tout primordial que les collègues qui se retrouvent à montrer une séquence en classe n’aient pas le sentiment d’être inspecté : laisser les personnels faire, se tromper pour pouvoir rectifier sans crainte d’un jugement dommageable.
Pour cela, l’institution doit être en capacité de rassurer les personnels, et notamment sur les temps d’analyse de pratiques entre pairs. Il s’agit bien que ces temps soient formatifs et non évaluatifs.
Sur certains territoires, pourtant, ce n’est pas le cas et on peut observer de la part de certains IEN voire de certains conseillers pédagogiques des injonctions diverses : groupes imposés, horaires définis… Ce n’est ni l’objectif initial, ni la finalité et c’est surtout le meilleur moyen d’aboutir un effet totalement contre-productif.

Accepter le regard de l’autre et travailler collectivement

Très souvent les enseignants – même s’ils forment une équipe pédagogique au sein de leur école – ont l’habitude de travailler seul au sein de la classe. Pas forcément facile d’accepter le regard d’un tiers au fond de la classe, d’autant plus que celui-ci est là pour apporter des avis sur la séquence.
Dès lors, les conseillers pédagogiques doivent pouvoir bénéficier de formations spécifiques afin d’être en capacité d’apporter un regard constructif et bienveillant indispensable à une évolution partagée des pratiques.
De leur côté, les enseignants concernés doivent admettre de travailler collectivement en sortant du schéma traditionnel, un enseignant/une classe.

Il est donc essentiel pour le Sgen-CFDT de ne pas imposer ces observations mais de les ouvrir sur la base du volontariat, tout au moins tant que le dispositif ne sera pas définitivement stabilisé.

Des formations centrées exclusivement sur le français et les maths

Il est regrettable que ce travail en constellations soit exclusivement consacré à des formations en mathématiques et en français. L’institution oublie dès lors peut-être un peu rapidement que les programmes sont fait d’autres disciplines toutes aussi importantes pour l’élève… et les enseignants !
Il serait ainsi bienvenu d’envisager ce même type de constellations pour des séquences d’EPS, d’histoire, de géographie… Diversifier l’offre, c’est permettre une meilleur accompagnement des enseignants afin de répondre au mieux à leurs besoins.
Pour le Sgen-CFDT, ces besoins de formation doivent être ainsi définis au plus près du terrain, par les équipes elles-mêmes.

Le cadrage national actuel vient en effet contraindre les collègues et ne répond pas à leurs attentes.

Ne pas dévoyer le dispositif par des interprétations locales dysfonctionnantes

Si ces formations en constellations peuvent être perçues comme des avancées, il ne faudrait pas, encore une fois, qu’un pilotage local, qu’un fonctionnement injonctif ou qu’un manque de remplaçants soient responsables de dysfonctionnements.
Pour la bonne réussite de ce dispositif, il paraît également important d’associer les enseignants à sa conception. Pour le Sgen-CFDT, la formation doit être une priorité car c’est une demande forte des personnels : une formation qui doit allier pratiques pédagogiques, et apports de la recherche.
Apprendre de ses erreurs doit aussi être un adage que l’administration gagnerait s’appliquer, pour faire évoluer le dispositif au plus près des besoins.

En tout état de cause, dans la période compliquée que nous traversons, avec des personnels fatigués, la bienveillance dans l’accompagnement et la mise en œuvre locale doit être de mise !