DHG dans les collèges du Rhône: Déshabiller Pierre sans habiller Paul

Lors du CSA SD du 2 février, l'inspecteur d'académie a présenté aux représentants des personnels la répartition entre établissements des moyens alloués au département du Rhône pour la rentrée 2024. Le "choc des savoirs" n'est pas accompagné par un un choc des moyens!

Les représentants siégeant au titre du Sgen-CFDT ont commencé leur déclaration liminaire par ces mots:

Monsieur Attal, éphémère ministre de l’Éducation Nationale et actuel chef du gouvernement, a voulu un choc des savoirs, mais pour le moment ce sont les personnels de l’Éducation Nationale dans leur grande majorité, qu’il laisse en état de choc. Jamais depuis au moins ces trente dernières années, l’école, notre école, n’avait été aussi violemment attaquée dans ses fondements, son essence, ses promesses républicaines d’égalité et de fraternité. Jamais le politique ne l’avait autant emporté sur le pédagogique, jamais les privilèges de quelques-uns ne l’avaient autant emporté sur l’intérêt de tous.

Évolution des effectifs dans le second degré dans le Rhône

Une légère baisse des effectifs s’amorce dans les collèges de notre département. 239 élèves en moins sont attendus à la prochaine rentrée sur l’ensemble des classes du 69, mais 38 élèves de plus en ULIS et 18 élèves de plus en Segpa. Le Rectorat s’engage certes au maintien des niveaux actuels des effectifs dans les classes: 26 élèves en éducation prioritaire, 30 en collèges ordinaires, mais cela se traduit par la fermeture de 15 classes sur le département.

Pour le Sgen-CFDT, la baisse démographique devrait être l’occasion, à moyens constants, d’alléger les effectifs dans les classes. Cela permettrait d’améliorer à la fois les conditions de travail des personnels et les conditions d’apprentissage des élèves et faciliterait l’inclusion des élèves à besoins particuliers ainsi que des élèves allophones.

Calcul des dotations par collège en 2023

L’année dernière, la dotation par collège était constituée, pour tous, de l’horaire obligatoire soit 26 heures, plus 3 heures de dotation complémentaire par division.

A cette dotation était ajoutée une allocation progressive de moyens: 7% de la DHG en REP+, 3% en REP et 1,46% pour 12 collèges ordinaires avec un faible IPS (Indice de position sociale).

Il s’agissait en effet de donner plus à ceux qui ont moins, principe d’équité développé dès les années 70 par le Sgen-CFDT. Une idée alors contestée quasi unanimement, mais que nous avons eu la faiblesse de considérer comme acquise plus de 40 ans plus tard. C’est que depuis 1983 l’éducation prioritaire a fait la démonstration qu’elle était une richesse. Pour les élèves, par ce qu’elle leur offre. Pour les personnels, par ce qu’elle leur permet. Pour les pratiques pédagogiques plus globalement parce que l’éducation prioritaire est un lieu phare de l’innovation en matière d’éducation.

Calcul des dotations par collège en 2024

Cette année, chaque collège reçoit toujours 26 heures plus 3 heures pour chaque division du cycle 4, mais les classes de 6ème ont perdu une heure : l’heure de technologie, devenue soutien/approfondissement en 2023, sera supprimée à la prochaine rentrée. L’horaire obligatoire est donc abaissé à 25 heures en 6ème.

L’allocation progressive de moyens a quant à elle disparue, remplacée par une allocation pour groupes de niveaux allouée à la quasi totalité des collèges du département (sauf sept). Cette allocation a été calculée sur la seule base des résultats aux évaluations nationales de 6ème 2023, l’IPS des établissements n’entrant pas en jeu.

Alors que fin 2022 la publication des IPS des collèges a jeté une lumière crue sur les inégalités sociales du système scolaire français, alors que fin 2023 l’enquête PISA a montré que la France est toujours l’un des pays de l’OCDE où le lien entre le statut socio-économique des élèves et la performance qu’ils obtiennent est le plus fort, notre institution fait le choix assumé de supprimer l’allocation progressive de moyens!

Déshabiller Pierre sans habiller Paul

La marge (moyens alloués au delà de l’horaire obligatoire) des collèges REP+ a donc été largement amputée. En s’arrêtant aux chiffres, on pourrait cependant se dire que c’est au bénéfice des collèges dits ordinaires (en moyenne par établissement 15,40 heures de plus qu’en 2023), dans lesquels enseigner n’est pas non plus un long fleuve tranquille et dont les élèves auraient bien besoin de moyens supplémentaires. Sauf que les moyens reçus sont entièrement fléchés pour constituer les groupes de niveaux en français et mathématiques en 6ème et 5ème, ce ne sont donc pas des moyens dont les équipes pourront se saisir pour faire des choix adaptés à leurs élèves en s’inscrivant dans leur projet d’établissement.

Pour le Sgen-CFDT, les groupes de niveau, loin de favoriser la réussite de tous les élèves, vont détruire le collège unique, vont assigner et stigmatiser les élèves. La mise en œuvre de ces groupes va obliger de nombreux établissements à rogner sur d’autres choix pédagogiques qui ont été faits par les équipes depuis plusieurs années: dédoublement en sciences, en langue, jeux d’options pour rendre l’établissement attractif, …

Ces mesures vont dégrader les conditions de travail des personnels et augmenter leur charge de travail, car c’est aux personnels qu’il revient de mettre en œuvre des mesures mal ficelées, mal pensées, incohérentes, sans les moyens nécessaires et contraires aux valeurs que nous portons.