Le droit de retrait permet, sans autorisation, à un fonctionnaire de ne pas accomplir une mission – de ne pas faire son travail – si celle-ci présente un « danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé », sans que ce soit pour autant un abandon de poste entraînant une sanction ou un retrait de salaire ; il autorise aussi à quitter le lieu de travail pour se mettre à l’abri. Cette procédure constitue ainsi un recours contre un abus de pouvoir de la hiérarchie ou une négligence importante concernant les conditions de travail, ou plus simplement pour faire face à une situation d’urgence.
Une procédure de sauvegarde, pas un substitut à la grève
Mais attention : il ne s’agit pas d’une aubaine qui permettrait de faire grève sans perte de salaire. Certains syndicats ont tendance à le laisser entendre. Or tout abus, même de bonne foi, peut se retourner contre le fonctionnaire, notamment par un retrait de salaire. Il est cependant admis que, si le danger n’est pas réellement grave ou imminent, il suffit que le salarié ait pu raisonnablement le croire, eu égard aux circonstances.
Droit de retrait: des exemples
On peut exercer son droit de retrait en refusant:
- Lors d’une sortie scolaire, de monter dans un car qui n’est manifestement pas sûr, ou dont le chauffeur n’est pas en état de conduire.
- de travailler dans une salle dont les éléments du plafond menacent de tomber.
- de travailler exposé à des émanations toxique.
- de travailler pour échapper à un harcèlement.
Mais on ne peut pas légitimement y recourir pour protester ou échapper à des conditions de travail difficiles mais pas dangereuses. Ni créer une situation mettant en danger d’autres personnes.
En tout état de cause, on doit prévenir sa hiérarchie, ou un représentant du personnel au CHSCT (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail), de la situation dangereuse et de sa situation de retrait. En ce qui concerne les enseignants, ils restent responsables des élèves. Ainsi, par exemple dans le cas d’une salle de classe dangereuse, il faut faire sortir les élèves, bien entendu, mais aussi continuer à les encadrer en-dehors de la pièce.
Le droit de retrait en cas de harcèlement
Une circulaire du 4 mars 2014 émanant du Ministère de la Fonction publique, dans le cadre de la lutte contre le harcèlement sexuel et moral, et en application de la loi, précise que le droit de retrait peut être utilisé en cas de harcèlement sexuel, et « pourrait être utilisé contre le harcèlement moral dès lors que le danger est considéré comme grave et imminent » (le danger grave est justifié par le caractère humiliant et hostile, et les conséquences psychologiques que cela peut entraîner chez la victime ; le caractère imminent dépend du contexte).
Cela dit, le droit de retrait ne peut pas suffire. On ne saurait trop conseiller de prévenir très rapidement un responsable du syndicat, voire directement son représentant au CHSCT : une situation de harcèlement est toujours trop grave et difficile pour qu’on l’affronte seul. En fait, faire appel aux élus CHSCT n’est pas obligatoire mais mieux, pour qu’ils déclenchent en parallèle ce qu’on appelle une « procédure d’alerte ». Ça entraîne une saisine automatique du CHSCT, ce qui permet une certaine transparence. Dans tous les cas, la situation doit être consignée dans le registre de signalement d’un danger grave et imminent. Le chef qui ne peut le produire est en faute. Notez d’ailleurs que si c’est le Rectorat qui doit gérer l’aspect juridique, ce sont les chefs qui sont tenus de mettre en œuvre des mesures de protection du collègue victime, sous peine d’être juridiquement en « faute inexcusable ».
D’une manière générale, n’hésitez pas à informer le syndicat d’un cas d’usage de droit de retrait. D’une part des conseils et du soutien ne sont pas à négliger pour prévenir une mauvaise interprétation de la situation par ses chefs. D’autre part, elle peut être le révélateur d’un problème plus collectif de conditions de travail. Et la solidarité syndicale sert à résoudre ce genre de difficultés.